L’architecture néo-mudéjar à Madrid
Néo-gothique, néo-classique, néo-romain, néo-renaissant… Au XIXème et XXème siècle apparaissent partout en Europe des retours à l’architecture du passé, rappelant l’origine des nations et adaptant des techniques modernes aux esthétiques traditionnelles. L’Espagne a récupéré le style mudéjar comme vous pouvez l’apprécier dans l’architecture néo-mudéjar de Madrid.
C’est une période où les pays européens souhaitent écrire leur histoire et illustrer leur identité, et l’Espagne mise alors sur le style néo-mudéjar : un retour à Al-Andalus, près de 800 ans d’émirat arabe sur la péninsule ibérique.
Ce passé marque en effet une différence forte entre l’Espagne et ses voisins du Nord, et permet à la nation espagnole d’affirmer sa spécificité esthétique en architecture.
Mais qu’est-ce que le “mudéjar” ?
“Mudéjar” est un terme qui renvoie à l’architecture chrétienne (roman, gothique, renaissance…) mêlée à des techniques et des formes musulmanes. Cette notion est créée au XIXème siècle et fait la fierté de l’Espagne, mêlant comme cela a rarement été le cas en Europe les influences arabes et ibériques du Moyen-Âge.
Plusieurs caractéristiques permettent de parler d’une architecture de style mudéjar. Tout d’abord nous devons citer les matériaux, plutôt tendres et faciles à manier, comme la brique, la céramique ou le stuc, parfois mêlés à la pierre. On trouve aussi des éléments arabisants dans la structure de l’édifice comme dans les décors intérieurs : les plafonds à caissons en bois, ou bien les ornements de céramique et les motifs géométriques. Enfin, un des éléments visuels les plus faciles à repérer est celui des arcs : brisé, polylobés, en plein cintre… Les formes des arcades et des ouvertures dans l’architecture Mudéjar sont très significatives.
Mais ces seules caractéristiques ne suffisent pas. Elles décrivent en effet le style arabe, dit “mauresque” sur la péninsule, or, pour parler de “Mudéjar”, il faut qu’elles se mêlent à des plans d’édifices chrétiens, montrant avant tout ce métissage entre plusieurs cultures.
Un retour à l’histoire
Bien que l’on est peu d’exemples madrilènes d’architecture de l’époque arabe de la ville, comme c’est le cas en Andalousie par exemple, le néo mudéjar, lui, est très présent depuis le XIXème siècle dans la capitale. L’envie de définir un style national espagnol a bel et bien poussé les architectes à revenir au mudéjar pour les constructions de gares, de théâtres, d’usines, d’écoles, et même de cimetières partout sur le territoire, mêlant ainsi comme autrefois les structures dites occidentales et les décors et matériaux mauresques. La malléabilité de la brique et ses possibilités esthétiques sont aussi redécouvertes à cette époque, et permettent de construire des usines fonctionnelles en pleine période d’industrialisation.
A Madrid, ce sont les architectes Agustín Ortiz Villajos et Emilio Rodríguez Ayuso qui se font connaître dès 1860 pour leur intérêt pour le néo-mudéjar, et sont responsables de la création de nombreux édifices encore debout.
C’est le cas par exemple des anciens abattoirs de Matadero, aujourd’hui centre culturel, dont l’administration (Casa del Reloj) est un très bel exemple de l’utilisation des caractéristiques structurelles mauresques dans une esthétique plutôt européenne, mais aussi de la Casa Arabe, nom actuel des écoles Aguirre, où Emilio Rodríguez Ayuso montre bien les possibilités décoratives offertes par la brique sur une façade très travaillée, tout en offrant un mirador de cristal très moderne.
Francisco García Nava construira quant à lui plusieurs églises avec les techniques mudéjar, ainsi que le portique du cimetière de la Almudena, qui nous montre une transition vers les esthétiques modernistes et l’art déco, qui prendront le pas dès les années 30 à Madrid.
Ainsi, que ce soit en visitant les églises San Fermin ou Santa Cruz, en allant voir un spectacle aux arènes de Las Ventas ou en passant par le quartier du château d’eau de Chambéry, l’architecture néo mudéjar est très présente dans la capitale madrilène, nous rappelant le passé de la péninsule ibérique et les échanges culturels qui font sa richesse.
La ville de Madrid offre ainsi des architectures cosmopolites, de l’architecture néo-mudéjar de Madrid, son histoire ayant traversé Al-Andalus, l’époque chrétienne, la dynastie des Habsbourg, l’Europe des Lumières et l’ère romantique, pour aboutir aujourd’hui à un paysage unique.
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